CVR@1: Une nouvelle relation avec les peuples autochtones exige une réconciliation économique

Commission de vérité et de réconciliation | Ressources naturelles et environnement

« L’avidité, faute d’un meilleur mot, est bonne. L’avidité est juste. L’avidité fonctionne. La cupidité clarifie et coupe à travers l’essence de l’esprit évolutionnaire. » – Gordon Gekko (Michael Douglas), Wall Street

Dans notre pays, où les richesses sont largement liées à une abondance de ressources naturelles, la terre est au cœur de plusieurs activités économiques. Étant donné que la majorité des Canadiens vivent à moins de 100 km de la frontière des États-Unis, le concept de partage des terres sur la majeure partie de la géographie du Canada se fait principalement par l’interaction de l’industrie des ressources naturelles avec les groupes autochtones. Les jugements des tribunaux découlant de désaccords sur ce partage ont largement contribué au développement du champ des droits ancestraux et issus de traités.

Les Appels à l’action publiés par la Commission de vérité et réconciliation (CVR) en juin dernier demandent des mesures concrètes pour remédier à l’héritage des pensionnats indiens dans ce pays. Ces 94 recommandations touchent l’ensemble de la société canadienne, y compris le secteur des entreprises, qui est invité à adopter la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA) dans ses politiques et activités opérationnelles de base impliquant les peuples autochtones, leurs terres et leurs ressources. Sur ce point, le rapport final note: « La réconciliation économique exigera de trouver un nouveau terrain d’entente qui équilibre les droits, les intérêts juridiques et les besoins respectifs des peuples autochtones, des gouvernements et de l’industrie en ce qui a trait aux changements climatiques et aux marchés mondiaux concurrentiels ».

Cela peut sembler plus raisonnable que ce à quoi on pourrait s’attendre, et c’est parce que le concept de réconciliation économique est difficile. Il va de soi que nous pourrions tous avoir un peu plus d’argent dans nos comptes bancaires. Mais ce n’est pas de ça qu’il s’agit. Il s’agit de la tendance de l’économie, le style de Gordon Gekko, dépasser la science, la santé, la culture, l’éducation, la religion, les sports, les loisirs et les arts comme une fixation culturelle unique. Cette fixation constitue la racine de certains des préjugés les plus tenaces au sujet des communautés autochtones du Canada de nos jours. Elle rend légitimes les arguments pour l’abandon des réserves au profit d’emplois au sud, ceux voulant qu’on devrait passer l’éponge une fois la compensation payée, et légitime le développement des ressources sans consentement. Elle légitime même les pensionnats. Les rapports de la CVR indiquent clairement que les politiques qui ont motivé les pensionnats ont pour but d’éliminer la notion de peuples autochtones de façon à permettre au gouvernement canadien de se débarrasser de ses obligations juridiques et financières envers les autochtones et de prendre le contrôle de leurs terres et de leurs ressources. Autrement dit, une chose que les pensionnats avaient l’intention de faire était de supprimer les peuples autochtones et les relations scellées par traités comme des obstacles à l’appropriation de toutes les ressources de la terre pour le bénéfice exclusif de la communauté des colons.

Ce n’est pas que l’économie n’est pas importante. C’est que la limitation de cette fixation en tant qu’approche à la consultation autochtone a été mise en évidence à maintes reprises. Si le Canada ignore l’importance des relations économiques mutuellement bénéfiques avec les peuples autochtones, il est condamné à répéter les injustices de l’ère des pensionnats. Comme nous le savons tous, avec le réchauffement climatique, il y a un prix à payer d’une vision étroite du développement économique. Inversement, nous constatons également que des gains incroyables peuvent être obtenus à partir d’une vision élargie. Rétablir la réconciliation économique signifie être en mesure de distinguer l’un de l’autre. De l’entente de transformation de la Voisey’s Bay avec la nation innue dans le nord du Labrador, à l’engagement de la Ontario Power Generation avec la nation Saugeen Ojibway sur le projet de dépôt nucléaire en profondeur sous le lac Huron, à la propriété de 50% dans McLean’s Mountain.  Des chefs d’entreprise et des conseils de Mnidoo Mnising, à l’établissement de sources indépendantes de revenus du projet de jeu Casino Rama pour chaque Première nation en Ontario, les acteurs corporatifs commencent à prendre le consentement au sérieux, ce qui peut générer des retombées pour les communautés concernées.

Nous avons rédigé les étapes concrètes nécessaires pour aller au-delà des affirmations vides de sens afin d’embrasser pleinement la DNUDPA. Nous avons écrit sur les exemples qui fonctionnent, et comment le monde avance avec ou sans nous. À sa base, la réconciliation économique nécessitera une prise de conscience et la compréhension que l’engagement est conclu avec des communautés vivantes, qui respirent et qui sont riches de leurs expériences et aspirations. Ces communautés ont une histoire, une organisation politique, des défis et des modes de vie qui, et avec le bon point de vue, peuvent ajouter une valeur énorme à l’interaction.

Bâtir la confiance est au cœur de cela, et signifie qu’il faut comprendre ces caractéristiques. Alors que prolifèrent les transactions entre les entreprises et les peuples autochtones et que la DNUDPA prescrit des consultations plus sérieuses, les entreprises qui en tiennent compte de façon adéquate dans leur stratégie de consultation auront le dessus. À titre de point de départ, les rapports publiés par la CVR au cours de l’année écoulée doivent être lus par tout promoteur ayant un plan sérieux de consultation des autochtones. En plus d’exposer les causes des pensionnats, ils décrivent le chemin qu’il reste à parcourir aux non autochtones pour comprendre les blessures profondes laissées par la vision à la base des pensionnats. Ces rapports sont judicieusement écrits pour nous tous. Nous savons tous que la réconciliation ne sera pas provoquée par la polémique des médias ou l’indignation. Ce n’est pas aussi facile que cela. Elle arrivera plutôt progressivement – le pardon éventuel d’un côté; la conscience éventuelle et la reconnaissance de la souffrance de l’autre, et ensuite l’action commune durable pour empêcher l’histoire de se répéter. Un jour, peut-être, il comportera une relation économique mutuellement respectueuse.

La CVR a repris cette responsabilité. La réconciliation économique est un incitatif à trouver un terrain d’entente entre les intérêts concurrents. Il s’agit de la pleine appréciation d’une communauté engagée. Selon les termes de la CVR, « Nous ne sommes pas encore là. La relation entre les autochtones et les non autochtones n’est pas mutuellement respectueuse. Mais, nous croyons que nous pouvons y arriver, et nous croyons pouvoir le maintenir. Notre ambition est de démontrer comment nous pouvons le faire. « 

par Oliver MacLaren

OKT présente: une série de blogues en l’honneur du 1er anniversaire des appels à l’action de la CVR

 

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